Lorsqu’on songe que l’espérance de vie à l’âge de 60 ans est de 22 ans pour les hommes et de 27 ans pour les femmes, on se dit qu’il n’est nul besoin de chercher par tout moyen à diminuer le temps consacré à la vie active. Une telle démarche, d’ailleurs, est en parfaite contradiction avec les valeurs qui sont les nôtres, celle d’un travail qui fédère et qui protège tous les salariés, des plus jeunes au plus âgés et qui crée de la richesse collective par la mobilisation de toutes les compétences.
Négliger l’emploi des seniors, le laisser subsister à des niveaux bien plus faibles que la moyenne européenne n’est pas seulement un gâchis humain : c’est aussi une véritable erreur économique et une lourde charge créée sans raison pour nos finances publiques. En laissant s’effilocher les fins de carrière, nous affaiblissons la substance de la valeur travail sur lequel nous voulons pourtant fonder l’ensemble de l’équilibre de notre cohésion sociale.
C’est pourquoi le Président de la République a demandé que tout soit mis en œuvre pour favoriser l’emploi des seniors. Nous avons très largement progressé dans cette voie :
avec l’amélioration du taux de la surcote, portée à 5% pour les années accomplies au-delà de 60 ans et du taux plein. Rien que pour le premier trimestre 2009, le taux de recours à la surcote atteint 12,5%, soit une hausse de près de 50% par rapport à l’année précédente ;
avec la libéralisation totale du cumul emploi-retraite pour les salariés âgés de plus de 60 ans et bénéficiant du taux plein ou âgés de plus de 65 ans ; avec le report à 70 ans de l’âge des mises à la retraite d’office avec la suppression programmée de la dispense de recherche d’emploi, véritable trappe à inactivité qui guettait les salariés les plus âgés en leur donnant le chômage pour perspective et la retraite pour tout horizon.
J’entends parfois dire que cette obligation serait trop lourde, que cette pénalité serait exorbitante. Je constate, pour ma part, que les entreprises semblent plutôt s’approprier la démarche puisqu’on dénombre d’ores et déjà environ 1 000 accords ou plans d’action d’entreprises et environ 50 accords de branche déposés, un chiffre qui est encore amené à croître au cours des prochaines semaines.
Permettez-moi à ce titre de saluer, en présence de son président Robert Volut, l’accord conclu hier par la Fédération française des industriels charcutiers, traiteurs et transformateurs de viande, qui établit des objectifs sur trois ans pour 340 entreprises employant 37 000 salariés.
Il ne s’agit pas de dicter aux entreprises un train de mesures particulières mais de leur permettre de définir la solution qui leur paraît la mieux adaptée à leur situation. Cela passe par la définition entre partenaires sociaux d’une vision de long terme de la place des seniors dans l’entreprise qui va bien au-delà du seul recrutement et qui englobe des questions aussi diverses que celles de l’adaptation des postes, de la formation tout au long de la vie, de la transition entre l’activité professionnelle et la retraite, de la prévention de la pénibilité, et bien d’autres.
Je rappelle, enfin, que les services de l’Etat sont pleinement mobilisés pour apporter aux entreprises toute l’aide dont elles peuvent avoir besoin et que la loi prévoit d’ailleurs que les directions régionales du travail sont chargées de donner aux entreprises qui le demandent un avis sur leurs accords ou plan d’action. J’ai écrit aux directions régionales et départementales du travail et de l’emploi pour leur demander de se mobiliser dans le cadre de ce dispositif. Elles tiendront des réunions d’information d’ici la fin de l’année dans chaque région.
Par ailleurs, nos réseaux d’expertise offrent eux aussi leurs services : je pense en particulier à l’agence nationale des conditions de travail que les entreprises ne doivent pas hésiter à consulter si elles le jugent nécessaire.
Mesdames et Messieurs, la mobilisation pour l’emploi des seniors à laquelle Laurent Wauquiez et moi-même avons souhaité vous convier ce matin n’est pas une politique catégorielle. C’est un enjeu majeur, qui engage la conception que nous nous faisons du travail comme expression de la liberté individuelle, comme fondement de toute solidarité et moteur du progrès social. A nous de nous mobiliser pour en défendre le principe.