La Chine, proche alliée des généraux au pouvoir, a appelé le régime militaire et les manifestants à faire preuve de "modération", mais s’est abstenue de condamner une répression qui a déjà fait au moins quatre morts.
Malgré l'interdiction de tout rassemblement, des milliers de manifestants ont convergé vers le centre de Rangoon, notamment le quartier de la pagode Sule. Ils ont fait face à des policiers anti-émeute et des soldats armés. La foule était nettement dominée par des jeunes, ont indiqué des témoins. Ils ont lancé des slogans liés au héros de l'indépendance, le général Aung San, père de l'opposante Aung San Suu Kyi, maintenue en isolement dans sa résidence depuis 2003. "Le général Aung San n'aurait jamais ordonné à l'armée de tuer des gens", criaient les manifestants, en référence aux victimes de la veille.
Finalement, dans ce quartier, les manifestants ont été dispersés après des tirs de sommation et un ultimatum très ferme. "Nous vous donnons 10 minutes. Si vous ne partez pas, nous prendrons des mesures extrêmes", ont crié par haut-parleur des soldats. Les forces de sécurité avaient auparavant tiré en l'air, alors que selon certaines estimations la foule atteignait des dizaines de milliers de personnes.
Au moins cent personnes ont été arrêtées sur place et forcées de monter à bord de camions militaires, alors que d'autres manifestants s'enfuyaient dans les rues adjacentes en courant, selon des témoins. D'autres tirs de sommation se sont produits dans la zone de Kyaikkasan où des groupes de protestataires étaient descendus dans la rue.
Des échauffourées ont éclaté dans au moins trois endroits distincts alors que les forces de l'ordre tentaient d'appréhender des moines pour les placer par la contrainte dans des camions.
Les religieux ont reçu le soutien d'habitants qui ont tenté de s'interposer.
De nombreux bonzes ont, par ailleurs, été interpellés dans leurs monastères et conduits, par camions, en dehors de la ville, vers une destination inconnue, dans le but évident de les empêcher de participer aux défilés.
Des témoins ont rapporté avoir vu au moins six camions chargés de moines. Une centaine de bonzes avaient aussi été arrêtés dans la nuit de mercredi à jeudi par les forces de sécurité qui avaient lancé un raid contre un monastère de l'est de Rangoon, ont indiqué des témoins.
Des témoins ont dit qu'un second monastère, non loin de là, avait été la cible d'un autre raid mais aucune information n'était disponible sur cette opération.
La junte birmane avait commencé mercredi à réprimer le mouvement de protestation mené par des bonzes, faisant charger des manifestants à Rangoon où au moins quatre personnes -un civil et trois bonzes- ont été tuées et cent autres blessées.
A New York, le Conseil de sécurité a demandé aux autorités birmanes de faire preuve du maximum de retenue face aux manifestants et de recevoir sans tarder l'envoyé spécial de l'ONU pour la Birmanie, Ibrahim Gambari.
Le secrétaire d'Etat adjoint américain aux Affaires asiatiques, Christopher Hill, a de son côté estimé jeudi à Pékin que la Chine devait "user de son influence" sur le régime birman pour faire cesser la répression.