Verdict : un an de retard supplémentaire en moyenne par rapport aux dates annoncées aux clients. Toujours en raison de problèmes d'industrialisation. "Outre la complexité de l'installation de câblage, la mise en oeuvre tardive de la maquette numérique en 3D, qui facilite la conception de l'installation des harnais électriques, avec un personnel en phase d'apprentissage, sont à l'origine de ces difficultés", explique un communiqué.
Il s'agit de la troisième annonce de ce type qui porte la totalité du retard à près de 2 ans par rapport aux prévisions initiales.
Concrètement, le premier exemplaire de l'A 380 sera donc livré au deuxième semestre 2007 à Singapore Airlines, et non plus fin 2006 comme prévu. Airbus prévoit ensuite de livrer 13 exemplaires en 2008, 25 en 2009, puis 45 en 2010, dont les premiers exemplaires de la version cargo.
La compagnie Emirates, plus gros client de l'A-380 avec 43 unités, a qualifié de « très grave » cette énième péripétie industrielle. Et se tient prête à « étudier toutes les options ». C'est-à-dire à exiger des compensations financières.
De fait, Airbus a d'ores et déjà calculé les conséquences financières de ce nouveau calendrier qui sont lourdes : 4,8 milliards d'euros de manque à gagner en terme de résultat brut d'exploitation (ebit) entre 2006 et 2010. Un chiffre qui inclut une perte sèche de 2,8 milliards correspondant aux dépassements de coûts et aux pénalités de retard et près de 2 milliards de perte d'Ebit qui seront décalés après 2010. Si l'on y ajoute une augmentation du besoin en fond de roulement de 1,5 milliard d'euros, la réduction des flux de trésorerie d'ici 2010 atteint 6,3 milliards d'euros.
En fait, EADS a encore du mal à évaluer l'impact à court terme de ses déboires industriels. Le groupe indique "qu'il ne publiera pas de perspectives 2006 actualisées", et ce jusqu’à nouvel ordre". Il estime simplement la perte d'Ebit à 1,1 milliard en 2006, dont 600 millions provisionnés en vue d'éventuelles résiliations de contrats. De même qu'il ne mesure pas les conséquences des mesures à venir concernant l'A 350 ou du plan d'économie qu'il va être amené à lancer.
Et Airbus va devoir se serrer la ceinture. EADS a annoncé un programme de réduction des coûts baptisé "Power 08". Objectif : économiser 5 milliards d'euros de trésorerie en cumul d'ici à 2010, puis encore '"au moins" 2 milliards d'euros par an après cette date.
D'ici au début de l'année prochaine, Airbus et EADS doivent encore examiner plusieurs projets visant à rationnaliser la structure de production internationale de l'avionneur européen. Il s'agira notamment de passer tous les sites européens en revue afin d'éviter les doublons même si Airbus "n'a pas de projet précis de fermeture d'usine" pour l'instant, a indiqué Christian Streiff. Le groupe va également examiner quelles activités font partie de son coeur de métier et quelles sont celles qui peuvent être sous-traitées.
Enfin le conseil d'administration a indiqué qu'il va conduire "une analyse indépendante sur les responsabilités individuelles ayant entraîné les retards de l'A380". Une enquête qui "ira jusqu'à examiner en détail les responsabilités potentielles au niveau de la direction".
Mercredi matin à Paris, l'action EADS chutait de plus de 10% à l'ouverture.