Suite à une saisine du ministre de l’économie
Le commerce équitable
A l’heure actuelle, le respect de grilles de prix minimum d’achat par produit constitue l’un des critères d’attribution de la mention « équitable » par Max Havelaar, qui est le principal acteur dans l’attribution de logos dans ce domaine en France. Des mécanismes différents sont cependant utilisés par d’autres acteurs.
Les parts du commerce équitable sur le marché français restent minimes, même si le secteur est en forte croissance du fait de l’arrivée de ces produits en grande distribution et de l’augmentation du nombre des intervenants. Les ventes de café équitable (2/3 des ventes des produits alimentaires équitables) comptent pour moins de 5 % des ventes totales de café. Pour les autres produits, les parts sont inférieures à 1 %.
Pas de restrictions de concurrence qui pourraient être interdites par le droit national ou européen
Pour le Conseil, même si la filière du commerce équitable demande, le cas échéant, aux intervenants qui s’en réclament d’adhérer à des conditions d’achat harmonisées auprès des producteurs des pays en développement, l’objet et les effets de telles ententes sont, en l’état actuel du développement du commerce équitable et de l’organisation de la filière, avant tout extra-territoriaux et échappent donc au champ d’application des règles européennes et françaises de concurrence.
Le Conseil souligne en effet qu’aux stades ultérieurs de la chaîne économique (étapes de transformation et de commercialisation) les acteurs du commerce équitable conservent une liberté de comportement de nature à préserver la concurrence et à laisser ouvert l’éventail des prix possibles pour la vente au consommateur, même si le prix de la matière première a été plus ou moins le même pour tous les opérateurs.
A cet égard, le Conseil a noté que le coût des matières premières achetées aux producteurs ne représente qu’une part relativement faible dans la composition du prix du produit final : 20 % du prix final du paquet de café, mais moins de 10 % pour la banane, le thé ou les jus de fruits.
La situation pourrait être différente si la part du commerce équitable se développait significativement ou si le mode de formation des prix en aval de l’achat aux producteurs évoluait. Dans ce cas, il faudrait examiner si une exemption serait possible au titre du droit national ou européen. Le Conseil a examiné, à titre prospectif, certains éléments qui pourraient être mis en avant.
Une démarche volontaire des consommateurs
Le Conseil a constaté que les produits du commerce équitable sont généralement plus chers de 5 à 15 % que les produits classiques comparables, mais que cette différence de prix n’entrave pas son développement. Ceci montre que le consommateur des pays développés est demandeur d’une telle démarche.
Toutefois, le consommateur, qui ne peut pas contrôler la réalité de l’action des différents opérateurs qui se réclament du commerce équitable, doit pouvoir bénéficier de systèmes de certification fiables qui apparaissent comme des « services » visant à garantir que le produit a bien été préalablement produit et acheté au producteur dans des conditions respectueuses de certaines valeurs sociales ou environnementales.
A l’heure actuelle, la multiplication des opérateurs, des distributeurs de produits du commerce équitable et des systèmes de certification promus par différentes sensibilités au sein de la filière, ainsi que l’existence de concepts proches que le consommateur a parfois du mal à distinguer, n’assurent pas une fiabilité suffisante de la démarche. Le Conseil estime ainsi que l’action engagée par les pouvoirs publics pour réglementer l’organisation de la filière, initiée par l’adoption d’une disposition législative définissant le commerce équitable et prévoyant que les organismes participant aux actions de certification dans ce domaine doivent être reconnus par une commission (article 60 de la loi du 2 août 2005), répond à un objectif légitime.
Veiller à ce que les systèmes de certification du commerce équitable fonctionnent de manière concurrentielle
Le Conseil a cependant souligné que ce sont précisément les conditions d’organisation de cette activité de certification qui sont susceptibles d’entraîner des restrictions de concurrence ayant un impact beaucoup plus direct sur le territoire national que d’éventuelles ententes visant l’achat aux producteurs.
De telles restrictions pourraient non seulement concerner les organismes du commerce équitable eux-mêmes, en tant qu’organismes « certificateurs », en diminuant ou en supprimant la concurrence entre eux alors qu’actuellement ils proposent de manière autonome des « produits de certification » différents, mais aussi concerner les distributeurs en diminuant leurs possibilités de vendre des produits relevant du commerce équitable, mais dont la commercialisation a suivi des démarches différentes.
Le Conseil a ainsi indiqué que la commission prévue à l’article 60 de la loi du 2 août 2005 devrait intervenir dans un contexte permettant de concilier, d’une part, l’octroi de garanties de la loyauté des opérateurs se réclamant du commerce équitable et, d’autre part, le maintien d’une concurrence suffisante en la matière. Il a, à cet égard, exprimé des réserves vis-à-vis d’une situation qui consacrerait un référentiel prédominant.
iAvis n° 06-A-07 du 22 mars 2006 relatif à l'examen, au regard des règles de concurrence, des modalités de fonctionnement de la filière du commerce équitable en France.
Le texte intégral de l’avis est disponible [sur le site du Conseil de la Concurrence ]i
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