Ce bilan de l'activité de recherche dans les universités de l'Hexagone fait apparaître que seules six universités françaises atteignent le niveau d'excellence mondiale, mesuré selon le critère des articles scientifiques publiés.
La première université française, Paris VI (mathématiques, chimie...), ne se hisse qu'au 104e rang mondial. Paris XI (physique, chimie...), deuxième en France, est à la 132e place dans le monde. Viennent ensuite Strasbourg-I (chimie, entre autres disciplines), 164e, puis Paris VII, Lyon-I, Grenoble-I.
Les grandes écoles sont encore moins bien classées. L'Ecole polytechnique, qui occupe le 8e rang national, se retrouve en 363e position mondiale. L'Ecole des mines de Paris, autre fleuron de la culture technique française, n'apparaît qu'au 1302e rang, et affiche, selon l'enquête un indice d'impact des publications extrêmement bas.
La position des autres grandes écoles est du même ordre: 1908e place pour l'ENS Chimie de Paris; 2097e pour l'Ecole centrale de Paris; 2896e pour l'Ecole nationale des Télécoms de Paris.
Les raisons de ce retard touchent en premier lieu au financement des universités. La France "ne consacre que 1,7% du PIB à l'enseignement supérieur, contre 3% aux Etats-Unis, explique Philippe Aghion, professeur (français) d'économie à Harvard, actuellement détaché à l'Ecole d'économie de Paris. "Il faudrait augmenter leur financement d'au moins un point de PIB", estime-t-il. Il conviendrait aussi d'y adjoindre des financements privés, juge l'économiste, ainsi que "des droits d'entrée, avec un système intelligent de bourses".
Au-delà de ce problème des moyens financiers, est aussi en cause le mode de gouvernance des universités. Selon Philippe Aghion, "il faut dépenser plus, mais il faut aussi dépenser mieux". Et de citer les exemple anglais et suisse, "libéral pour le premier et dirigiste pour le second", qui "marchent mieux". Dans le premier cas, "les universités ont la liberté d'embaucher qui elles veulent et de fixer les salaires qu'elles veulent". Elles peuvent ainsi, assure le spécialiste - co-auteur de "Education et croissance", avec Elie Cohen -, attirer des chercheurs, dans un système de concurrence mondiale. Les universités françaises "devraient pouvoir choisir leurs chercheurs", plaide-t-il.
Autre faille du système français: la dissociation trop grande entre recherche et enseignement. Les Etats-Unis "ont compris l'importance de cette approche qui mêle les deux", explique le chercheur français, qui enseigne depuis des années dans la "meilleure" des universités mondiales: Harvard. Ils ont adopté ce système, appelé Humboldt, qui, en liant étroitement recherche et enseignement, "permet une communauté de pensée d'où nait la créativité", explique Philippe Aghion.
Ainsi faut-il mettre fin, selon lui, à la coupure entre grandes écoles - "où on trouve de bons étudiants mais peu de recherche académique" - et universités. Et mettre fin à la coupure entre enseignement et recherche.
"C'est un peu ce qui est fait dans les pôles d'excellence", reconnaît le spécialiste. Enfin, il faudrait selon lui permettre une vraie concurrence entre les universités, avec des récompenses, sous forme de fonds supplémentaires, pour celles qui sont performantes en matière de publications.