L'ancien premier ministre est débout, tourné vers le vice-procureur Romain Victor qui le surplombe, à sa droite, et l'interroge. La colère qu'il contenait jusqu'à présent éclate, froide et sèche. Tandis que les débats s'enlisent d'un point de vue judiciaire, il entend leur donner une lecture purement politique, prenant violemment à partie l'actuel président de la République et certains de ses proches.
«Je n'ai pas demandé au général Rondot de venir avec ses fiches et ses petits crayons pour en faire le scribe d'un ministre qui complote, déclare-t-il, tendu à l'extrême. Si j'avais voulu régler des comptes avec Nicolas Sarkozy, ce que je n'ai jamais fait, ignorant même les coups qui m'étaient portés, pourquoi ne pas s'intéresser à Claude Guéant ou Brice Hortefeux, qui alimentent les soupçons sur de grands contrats financiers ? Cela n'a pas été le cas, cela ne figure donc pas dans les fiches du général Rondot. Le 9 janvier 2004, nous n'avons jamais évoqué Nicolas Sarkozy en lien avec des comptes bancaires cachés. On ne demande pas au général Rondot ou, plus tard, à un service comme la DST de faire une enquête si on veut comploter ! Une dénonciation calomnieuse a ceci de particulier, en matière politique, qu'elle signe la mort de celui qui en est à l'origine. Il faudrait n'avoir aucun sens de sa propre survie, aucun sens de son honneur pour agir de la sorte. Il y a ici quelque chose de scandaleux, et le général Rondot peut en témoigner : nous n'avons pas comploté».