Des bénéfices pour l’instant imputés en provisions
Tout a réellement commencé en 2005, alors que les producteurs d'emballages étaient pressés de verser 402 millions d'euros à Eco-emballages, tandis que, parallèlement, les collectivités locales ne se voyaient être redistribuées par l'éco-organisme que 332,9 millions d'euros.
Et quand bien même les calculs se fassent encore par approximation – car non finalisés - pour 2006, il est déjà quasi public que les provisions d'Eco-emballages atteindront la coquette somme de 100 millions d'euros !
Evidemment, ladite somme fait des jaloux et suscite des appétits. Par exemple, Nicolas Garnier, délégué général d'Amorce insinue que «les collectivités tirent la langue» pour financer la collecte sélective des emballages de leurs contribuables. Quant aux généreux contributeurs en amont, ils préfèrent, pour l’instant, garder le silence.
Soyons malgré tout pragmatiques : en effet, si ces provisions de 100 millions d'euros ont pu être constituées au cours de plusieurs années, sachant en outre qu’une grande partie provient des deux derniers exercices (2005 et 2006 soit après l’adoption du nouveau barème), elles ne feront que « gonfler » généreusement puisque ledit barème court jusqu'en 2010 !
Mais le directeur général, Bernard Hérodin, ne l’entend pas de cette oreille : selon lui, la règle du jeu est fixée par les pouvoirs publics et ce jusqu’en 2008, à mi-parcours où un rapport d’étape, un vrai diagnostic de la situation, doit être produit. Par Eco-emballages …
Bernard Hérodin persiste et signe : «les prévisions sont à peu près conformes aux calculs de départ», affirme-t-il à qui veut l’entendre.
Les raisons mécaniques de ce décalage sont pourtant simples à comprendre : pendant que le soutien des fabricants d'emballages restait stable durant plusieurs années, les dépenses des collectivités, elles, ne faisaient qu’augmenter.
Ces courbes divergentes conduisirent à un résultat assez facile à anticiper : primo, Eco-emballages devait créer comptablement des provisions (les fabricants donnent plus d'argent qu'il n'en est dépensé) pour justifier fiscalement ses liquidités, des sommes qui sont censées être utilisées à partir du moment où les dépenses des collectivités dépasseront les sommes versées par les industriels et en plus sous conditions, des conditions plutôt drastiques de performances de la collecte.
Il n’est donc pas étonnant que l’association Amorce n'apprécie pas que l'adhésion récente et par défaut à Eco-emballages du secteur pharmaceutique, dont les contributions sont estimées entre 12 et 14 millions d'euros, n'ait pas été suivie par une hausse de certains soutiens.
«Nous voulons renégocier dans les domaines qui concernent les emballages de médicaments, c’est-à-dire l’aluminium, le papier-carton, le plastique, et surtout la valorisation énergétique, puisque la plupart de ces emballages sont incinérés» a déclaré Nicolas Garnier, se fondant sur une réalité économique et industrielle incontestable.
Mais Amorce souhaite également aller plus loin et notamment que soit prolongé le système de compensation d'Eco-emballages vis-à-vis de certaines collectivités tout au long du fameux barème D. Car ce dernier, impliquant des pertes financières pour environ un tiers des collectivités par rapport au barème C, aura même fait qu’une compensation totale soit instaurée … jusqu'en 2008. Mais après ? Moins 50% en 2009 et bis repetita l’année suivante ! Soit 25%.
Cette mesure, Bernard Hérodin refuse d’y répondre favorablement car, dit-il, « il n'est pas question que les collectivités qui ne sont pas intéressées par le barème D soient compensées jusqu'au bout.»
C’est un argument qui se défend mais il faudrait bien un jour « casser le cochon » des 100 millions et donc distribuer le pactole. La réponse du fief de Levallois : ces sommes seraient déjà dépensées si les collectivités étaient plus performantes. Bref, globalement, un bonnet d’âne pour les élus et responsables locaux, accessoire vestimentaire qui devrait déplaire fortement et en particulier aux institutionnels qui défendent les intérêts locaux, à l’instar de l’AMF.
Et quitte à vraiment secouer le cocotier, Eco-emballages reproche également à ses partenaires de ne pas assez dépenser en communication, de ne pas embaucher suffisamment d'ambassadeurs de tri «qui ne leur coûteraient pourtant rien». Bref à Levallois on a raison. Ailleurs, on a tort. Avec, quand même, en filigrane, cet aveu terrible qui révèle finalement que tout ce dispositif n’est rien d’autre qu’une vaste opération de communication. Loin des déchets et des questions environnementales …