Non, le continent européen, qui c’est vrai a connu de funestes heures dans son histoire contemporaine, ne pouvait en une génération et quels que fussent les moyens utilisés, combler les écarts et différences entre pays tant ceux-ci étaient importants et ceci personne ne pouvait l’ignorer.
Non, les différences culturelles et linguistiques ne pouvaient être reléguées au second plan derrière la création de cette monnaie qui a certes des vertus mais qui impose des rigidités et contraintes devenues insupportables et inacceptables.
Être député européen c’est un métier technique qui n’a rien à voir avec celui de représentant d’une circonscription dans notre pays. L faut le savoir : les décisions sont longues à prendre, demandent une connaissance parfaite du droit et de l’économie des autres et donc débouche fatalement sur une technocratie tatillonne du seul fait des multiples allers et retours des décisions à prendre.
Nous, comme les autres, avons à appliquer des textes qu’aucun de nos compatriotes n’aurait imaginés. Même la représentation nationale a vu, au travers de cette évolution, qui nous fut présentée comme inéluctable et irréfragable, ses pouvoirs de déliter et la portée de ses actions réduite à une portion si congrue que chacun d’entre eux, au-delà des clivages politiques, trouve désormais incongrue …
Le résultat est celui d’une note salée avec un premier volet, pour sauver notre monnaie, l’euro, de 750 milliards d’euros. La crise financière a finalement fait moins de dégâts à court et moyen terme.
Déjà surendettés, les pays de la zone Euro vont donc devoir lever des fonds. Et M. Trichet fera tout pour éviter que ne s’active la planche à billets mettant en péril le seul schéma qu’il connaisse à savoir celui d’une inflation nulle et de taux d’intérêts très bas, autant de facteurs qui n’ont plus aucun sens dans un contexte économique où seule l’inflation peut encore éviter une grave dépression.
Pourquoi ne pas avoir agi et réagi avant ? D’abord parce que l’on a tout confondu, mêlant économie et finances là où les finances ne sont qu’un outil, parmi d’autres, pour servir de levier sur les systèmes macroéconomique comme microéconomiques des états membres, des états qui comme les autres ont besoin de recettes pour faire face à leurs dépenses, ont besoin aussi de créer des richesses, y compris par l’emprunt, qualifié de « bonne dette ».
Le résultat est aujourd’hui dramatique. Avec la Grèce mise sous tutelle. Avec un risque presqu’équivalent qui pend au nez de nos amis portugais et espagnols. Pour ne citer qu’eux.
Si au lieu de s’entêter les 26 autres membres de l’Union avaient laissé la Grèce « flotter » un temps en lui octroyant le droit de battre à nouveau monnaie et donc de laisser circuler des drachmes, il y a fort à parier que la note n’eût pas été aussi lourde, en valeur absolue comme en conséquences politiques et économiques désormais pour une décennie.
Les grecs descendent dans la rue car ils n’ont plus rien à perdre et d’autres citoyens d’autres pays membres les rejoindront, peu à peu, au fur et à mesure que l’utopie continuera de diriger nos systèmes et finalement notre « pensée unique » dont nous sommes presque tous les victimes.
Les années fastes du XXème siècle ne sont ni celles de la rigueur, ni celles de marges de manœuvres devenues trop ténues pour réagir. Les « glorieuses », celles qui ont permis à nos parents et grands parents de traverser les méandres des caprices de nos économies et renversement conjoncturels sont celles où pouvaient s’ajuster les variables que sont les taux d’intérêts et la masse monétaire, deux leviers essentiels qui, malheureusement, ont quitté notre sol. De cette utopie qui nous mine, l’addition est lourde. Les peuples n’avaleront pas toutes ces couleuvres là sans réagir et il se pourrait que les bulletins de vote, comme le montrent les renversements allemands et anglais, deviennent assez vite des armes de destruction massive …
Bernard Marx