Le modèle est très intéressant, aussi bien sur la forme que sur le fond : l’ouverture porte bien son nom car la majorité au pouvoir, exécutif et législatif, n’a pas cédé à la tentation de certains de nos voisins d’une fragile et instable coalition nationale dont la seule vertu constatée se traduit en immobilisme, au mieux, en empoignades, au pire.
Cette réorganisation dans les faits des rouages de nos institutions pourrait, a priori, faire croire que le gouvernement Fillon serait un laboratoire mais il n’en est rien.
Tout a été mûrement réfléchi. Tout a été programmé. La préparation longue et minutieuse dans la durée par le président de la République tranche nettement avec l’impréparation - avouée d’ailleurs - de Madame Royal lui conférant au passage, par sa spontanéité, un certain capital de sympathie, un capital qu’il faudra cependant faire fructifier pour rester dans la course pour 2012.
En revanche, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs : le PS et ses caciques vivent une déchirure sans précédent dans l(histoire du parti. Et le doute s’est emparé des troupes de l’UMP qui vivent assez mal d’avoir ainsi été écartées des allées et couloirs du pouvoir et des responsabilités.
Cette déchirure à gauche suscite en outre des réactions d’un autre âge : en effet, mardi dernier, Le bureau national du PS a tenté, mardi dernier, par un vote solennel et "à l'unanimité", de mettre un coup d'arrêt à la stratégie "d'ouverture" de Nicolas Sarkozy, en interdisant par exemple à Jack Lang de siéger dans une commission gouvernementale de réforme des institutions, au risque d'être suspendu des instances dirigeantes.
Cette décision vise, bien entendu, au premier chef, l'ancien ministre de la Culture, sollicité par le président Nicolas Sarkozy pour participer à une commission sur la réforme des institutions.
Peu élégante, empreinte d’un raidissement autocratique, cette position raide de M. Hollande et ses proches, même si la suspension en question ne durerait que le temps de la participation à la commission en question, n’est qu’une pierre de plus dans le jardin de la rue de Solférino, transformé en morne plaine.
Pour autant, il faut relativiser car des résultats des derniers scrutins ressort clairement que la seule force politique d’alternance est le parti socialiste et lui seul. C’est sans doute pour cette raison que ce grand parti d’opposition tente par tous les moyens de reprendre la main et donc de peser sur certaines décisions, à l’instar de la nomination du président de la Commission des Finances à l’Assemblée nationale.
En revanche, le PS ne peut prétendre participer au choix des groupes de réflexion mis en place par l’Elysée. Le parti encore entre les mains de François Hollande ne peut en aucune manière infléchir les choix de personnes opérés par François Fillon.
La frontière est pour tous assez nette mais semble encore floue pour les socialistes qui ne semblent pas encore remis de leurs défaites.
Que l’on ne s’y trompe pas : l’opposition n’a pas vocation à s’opposer mais davantage à proposer ! D’ailleurs, certains l’ont compris et jouent le jeu : M. Lang s'était déclaré dimanche "honoré" de la proposition présidentielle et M. Strauss-Kahn, pressenti pour diriger le FMI, avec l’accord et le soutien de la France et de l’Union européenne, n’a fait aucun procès d’intention au chef de l’Etat.
Cette déchirure qui frappe fort sur les murs et dans les couloirs de l’hôtel particulier du PS devrait, plutôt que de susciter ces réactions bileuses, inciter les dirigeants socialistes à accélérer le nécessaire travail de reconstruction, de refondation et de programmation pour l’avenir s’il ne tient pas à rester encore dix ans sans responsabilités nationales.