En revanche, à première vue, les grands perdants seront les électrices et les électeurs.
Pourquoi ? Car le rouleau compresseur médiatique et institutionnel cristallise la course au finish sur une bipolarisation qui est loin d’être certaine et qui, en plus, est préjudiciable au nécessaire débat démocratique qui précède, dans la Vème République, toute élection présidentielle, fût-elle un tant soit peu dénaturée depuis l’adoption du quinquennat.
Pourquoi ? Parce que la campagne n’a pas encore vraiment commencé et que les indicateurs quasi quotidiens que l’on nous livre ne sont finalement que des témoignages de sympathie, des gestes d’humeur mais pas encore de réelles intentions de vote. L’histoire récente, en 1995 comme en 2002, est là, cruelle pour certains, pour en attester.
Pourquoi ? Avec près de quarante prétendants dont une demi douzaine susceptibles de peser dans les résultats, rien n’est joué ; contrairement aux apparences la gauche est plus divisée que jamais, son discours est plat et ses propositions passéistes finiront par lasser ou agacer et corrélativement la droite républicaine part avec le lourd handicap d’être au pouvoir après avoir déçu. Ne serait-ce que pour ces deux raisons, la gauche de la gauche fera le plein de voix, François Bayrou pourrait créer la surprise et M. Le Pen restera au firmament de ce à quoi il peut prétendre. Avec un bémol cependant : le « sale boulot » sécuritaire a été fait par le ministre de l’Intérieur et du coup la sécurité des personnes et de biens n’est plus, comme il y a cinq ans, la préoccupation majeure de nos compatriotes. De ce point de vue, M. Sarkozy sera le grand gagnant et nous lui devrons sans doute par cette action réussie dans la durée le plafonnement du score du FN qui fera que celui-ci ne passe pas le 1er tour.
En revanche, encore aujourd’hui, le petit Nicolas fait peur ou suscite des craintes, un peu à la manière de M. Chirac dont on disait, il y a près d’un quart de siècle, « le fascisme ne passera pas » ! L’Histoire a révélé la pertinence du slogan gauchiste … qui aura eu comme seul effet positif de créer les conditions d’une vraie alternance républicaine en 1981.
Parallèlement, Madame Royal accumulera les erreurs et, la vacuité de ses propositions et la « haine » distillée par ses proches, ne sont pas de nature à rassembler d’autres populations que les revanchards, ce qui devrait logiquement l’empêcher de battre le score obtenu par Lionel Jospin en son temps.
Dès lors, il n’est pas impossible que MM. Bayrou et Sarkozy se battent pour la première place au premier tour. Ce serait une première dans la Vème république mais une première ô combien rassurante puisqu’elle ouvrirait une perspective nouvelle, intéressante et prometteuse d’union nationale, réaliste, pragmatique, humaniste et moderne, une union nationale plus féconde que celle d’outre-rhin et surtout de nature à faire s’exercer un pouvoir plus proche des préoccupations des uns et des autres par cette alliance objective qui ne pourra se départir de l’impérieuse nécessité de faire entrer des représentants de la société civile aux responsabilités.
Certes les dés ne sont pas jetés. Mais à force de faire des simulations, avec des fourchettes hautes et basses pour les principaux postulants, l’issue salvatrice apparaît plus que jamais comme une hypothèse probable donc loin d’être une spéculation …