Car la note à payer est plus que lourde : ce sont en effet plus de 770 milliards de dollars US qui seraient nous affirme-t-on suffisants pour sauver de la faillite un certain nombre d’opérateurs du monde de la finance. La partie émergée de l’iceberg a peut-être été bien évaluée mais il restera forcément de lourds cadavres dans les placards, des dossiers pourris et véreux qui, pour l’instant, ne sont connus que ceux qui émargent à mille fois notre SMIC si ce n’est davantage …
Et le retentissement des effets de cette réaction en chaîne sur la vie quotidienne des citoyens et contribuables de tous les pays développés – et les autres - est difficile à appréhender et impossible à réellement maîtriser, d’autant qu’après coup les marges de manœuvre n’existeront plus.
D’une certaine manière, cette crise – structurelle et non conjoncturelle – vient nous rappeler quelques principes de bases et de bon sens que nombreux sont ceux qui nous dirigent, dans les sphères publiques et privées, semblaient avoir oublié.
Les banques, à l’instar de Dexia qui, semble-t-il, est, elle aussi, dans la tourmente, ont pour objet social de prêter de l’argent et se rémunèrent sur les taux pratiqués en fonction des risques qui sont pris. Or le prêt consenti pour l’achat d’un appartement, d’une maison, d’une usine d’incinération ou d’une station d’épuration n’a rien de « pourri » ni de « junk » comme le disent les américanophones !
La signature des prêteurs comme des emprunteurs est a priori solide et les sommes que prête la banque proviennent soit des dépôts de ses clients lorsqu’elle dispose d’un réseau, soit de sources de refinancement auprès d’autres établissement, de crédit eux-aussi, qui consentent alors le même prêt – pour l’exemple – à des conditions plus favorables, la différence formant la marge brute bancaire que l’on pourra, par abus de langage, appeler la valeur ajoutée. Ce circuit qui consiste à aider les particuliers, les entreprises et les collectivités à investir est sain et contribue à la création de richesses à tous les niveaux. La finance a besoin des emprunteurs et vice-versa ! Sans demande en liquidités, l’utilité de la sphère financière est réduite à néant.
En revanche, les marges dégagées, dans un contexte aussi classique, sont assez faibles et du coup la tentation est grande d’accroître les profits en prenant des risques. Il existe là deux écoles :
- il y a la première, qui relève du métier de banquier lui-même, qui consiste à investir en bourse des liquidités sur des valeurs, notamment industrielles, qui par leur rentabilité dégageront un double bénéfice : celui du dividende versé aux actionnaires et la potentielle plus-value dégagée lors de la revente desdites valeurs, les actions cotées sur les marchés,
- et il y a parallèlement cet appât du gain, malsain, qui consiste pour des traders surpayés à « faire des paris » sur les valeurs futures - un investissement donc virtuel -de quelque chose qui n ‘est pas davantage tangible comme un indice ou un taux à terme ; ce n’est plus là de la banque ni de la finance, c’est purement et simplement un jeu de casino où les croupiers, les joueurs et la caisse sont tous de mèche, un jeu qui ressemble à un puits sans fond où ceux qui jouent ont le rôle très agréable d’être généreux avec l’argent des autres !
Et puis il y a l’information, distillée ici ou là, savamment orchestrée tant sont nombreux ceux qui profitent d’un système qui n’a d’autre solution que d’être en totalité remis à plat, une information volontairement tronquée , erronée, travestie, pour dissimuler d’autres abysses qu’il serait dangereux de laisser poindre dans un horizon déjà sombre. Le meilleur exemple est celui dit des « subprimes » car face aux américains – et les autres – surendettés pour l’acquisition de leur bien immobilier, ce dernier, pour autant, n’a pas perdu la totalité de sa valeur, loin s’en faut !
Mais la saisie des biens du petit épargnant est tellement plus simple à mettre en œuvre que de couper les têtes, toutes les têtes, de ceux qui ont conduit à cette situation catastrophique et même surréaliste, une situation qui fera que demain, sans doute, plus jamais les argentiers ne feront autre chose que leur métier et feront ainsi disparaître les tapis verts de leurs univers devenu pestilentiel. C’est assurément là la clé du plan de sauvetage qui coûtera à tous les contribuables des pays développés mais un plan qui, simultanément, doit aussi sans état d’âme mettre un terme immédiat à certaines pratiques et à certains mandats. Sans pénalités. Sans parachute doré.
Le glas a sonné pour ces brebis égarées qui se sont gavées de profits formidables au cours des dernières années. La fête est finie. Les brebis, elles aussi, doivent payer.
Bernard Marx