Il a osé !
Rassemblés en nombre, mus par une colère froide et sans doute difficilement réversible, les femmes et les hommes qui manifestaient sur la place du parvis de Notre-Dame-de-Paris étaient aussi résolus. Au nom de quoi fallait-il donc changer le nom de cette place qui appartient à notre Histoire pour l’affubler de connotations religieuses, épiscopales et, d’une certaine manière, xénophiles?
Le pouvoir des maires est grand, localement. Il n’est donc pas rare et pas nouveau non plus d’ailleurs que de manière discrétionnaire les places, les rues et les artères changent de nom pour épouser la mémoire d’une poignée de décideurs passionnés. Nombreux sont encore les noms des acteurs et fondateurs de l’URSS dans les bastions communistes, en particulier en Île-de-France, sur les plaques de rues et avenues alors que leur tribut à notre Histoire, aux progrès démocratiques ou spirituels au fond reste plus que critiquables.
L’usage veut en outre que l’on attende - en général une période de cinq années - avant de « se servir » de la mémoire d’un disparu dans un dessein collectif qui dépasse le cadre d’une banale cérémonie. Cinq ans c’est court ! Surtout face à l’éternité. Surtout aussi pour que soient inventoriés et passés au crible les actes et déclarations de ces défunts que l’on vénère un jour mais que l’on pourra brûler le lendemain pour les avoir par trop adorés.
Une manoeuvre politique et médiatique
Le nom d’un pape, fût-il exceptionnel, n’a pas à figurer sur nos plaques républicaines et en particulier sur celles d’un haut-lieu comme celui-ci. Aucun autre prélat, rabbin, imam … ne vient occulter la mémoire collective d’un monument historique ! La séparation des pouvoirs a eu lieu. Elle existe. Qu’on se le dise ! Le pape en question n’est mort que récemment et si les chances sont grandes qu’il soit canonisé, au terme d’une période qui, elle, sera respectée par le Vatican, l’utilisation de son nom pour lui rendre hommage plus tard ne pourra que se faire avec son vrai patronyme – Karol Wojtyla – et non son « pseudonyme » symbole de l’exercice de son pouvoir et de ses responsabilités religieuses, en sa qualité de suzerain pontife.
Agissant de la sorte, Bertrand Delanoë a révélé au grand jour son mépris pour les principes fondateurs de notre République, sa volonté systématique de passer en force sur le seul fondement de ses convictions qui heurtent et blessent celles et ceux qui restent attachés aux repères et valeurs, son ego si surdimensionné qu’il envahit au-delà du raisonnable la capitale de notre pays.
Avant que de défléchir l’un des plus beaux joyaux de la cité de Lutèce, il eût été salutaire que les tentatives déhortatoires des opposants à ce sacrilège l’incitent à réfléchir.